21 février, 2006

NINA AU RÉSERVOIR


Que du feu

"Dans les champs de ruine
Sous les pluies d'hémoglobine

Je te cherche
Je te cherche et
Je n'y vois que du feu"



06 février, 2006

SEMAINE ROYALE


Entamée par deux films à sceptre : ROIS ET REINE, enfin vu, et THE KING, vu grâce à la pertinacité de Bayon (cf série B dans Libé du 1er février). Approuvés et même applaudis.

ROIS ET REINE est de fait assez jubilant. Mathieu Amalric, déchaîné, compose un personnage ultra attachant. Son duo avec l'avocat substitué Maître Mamanne (Hippolyte Girardot, épatant) fonctionne à plein régime en version sécu du tandem Las Vegas Parano Depp/Del Toro (Dr Gonzo, un parent...).
À l'exception peut-être de la soeur de Nora qu'on perd en cours de film, tous les personnages sont réussis : la petite gourde dépressive dont Ismaël sera le prince calmant ; le père d'Ismaël, d'une insolante ataraxie, faisant passer l'impassible "Harry" Eastwood ou le colonel Kilgore pour de vulgaires anxieux (scène désopilante du braquage de l'épicerie familiale) ; la psy Deneuve, les infirmiers...
Le montage est subtil, les coupes fréquentes à l'intérieur d'une même scène, pour prendre le meilleur dans chaque prise, sont habiles.


THE KING est impeccable. Il porte des mexican boots, conduit une Mercury Cougar de 67 et ne joue ni du couteau ni du fusil de parade pour faire mine. Il essuie même la cuvette quand il pisse à côté (1ère cinématographique ?).
Tuer le fils. Elvis et Paul sont dans un motel, Paul postillonne l'eau bénite : qu'est-ce qui reste ?
Aucune musique scabreuse pour venir saccager les jolies scènes de désir au bord des eaux juvéniles, mais un splendide piano travelling qui mène au macabre endormissement des reines.

Deux films qui donnent furieusement envie de faire du cinéma.

Semaine royale vous disais-je, qui va se poursuivre aux Pays-Bas : départ imminent pour Amsterdam avec les bandes, en vue de remix global.

01 février, 2006

DOLCE VITA

Une semaine d'écriture et de composition pour plusieurs chantiers. Tout d'abord ce livre que j'ai décidé, coûte que coûte, de décrèter achevé avant le fond du printemps, pour pouvoir, dès que possible, passer au suivant ; de la correspondance, des arrangements sur un nouveau titre, et le texte pour Minimum Rock'n'roll remis juste avant le gong hier soir. Titre : Coeur de snakeskin. Une aventure de Keith Richards et Anita Pallenberg période 68/70. L'occasion de me replonger dans ces années aussi terribles que fascinantes, de la noyade de Brian Jones au désastre d'Altamont.

TANGER
La réécoute des titres dernièrement enregistrés avec Tanger se passe sans surprises : les faiblesses se renforcent, les forces s'épanouissent. Le pont des Arts me surprend, je redoutais de m'en fatiguer très vite, le duo avec Nina est toujours aussi touchant et les impros avec Renaud ramènent au Tanger des origines.

En écoute au château cette semaine :
Outre le Cat Power (cf note plus bas)



- l'excellent Sébastien Tellier sort "Sessions", des versions acoustiques (piano, guitare) de ses plus belles chansons. L'occasion de retrouver Broadway, Universe, l'inusable Ritournelle et Fantino dans un dépouillement qui révèle à quel point le songwriting tient la route, servi par un chant classe et touchant qui rappelle parfois Neil Hanon. En bonus une cover de la Dolce Vita de maître Christophe. Emballé par un graphisme génial, entre Gainsbourg et Wyatt.



Au hasard d'une visite au mégastore des Champs, j'ai mis la main sur un album créditant David Sylvian et Steve Jansen ! Je n'en revenais pas. Comment ai-je pu passer à côté de la nouvelle ? Je n'ai vu aucune critique dans la presse musicale française. Le collectif qui réunit les deux frangins et Burnt Friedman s'appelle 9 horses et leur premier album a pour titre Snow borne sorrow. Soit neuf titres dont on pouvait redouter qu'ils soient principalement instrumentaux, mais pas du tout, c'est de neuf chansons neuves dont il s'agit, neuf chansons où l'on retrouve intacte la voix du beau David, accompagné par des collaborateurs réguliers (Sakamoto, Keith Lowe à la basse, Arve Henriksen à la trompette), mais aussi une nouvelle venue : Stina Nordenstam.
Après enquête, ce projet sorti l'automne dernier sur Samadhi sound (label de Sylvian) rassemble des titres réalisés entre 2001 et 2005 en Allemagne et aux USA. Sylvian explique lors d'un long entretien radio que l'assemblage du projet a eu lieu par correspondance. Sakamoto a ainsi enregistré les cordes à new-York et envoyé le tout par mail, idem pour les autres. Aucune véritable séance de studio n'a rassemblé les intervenants.
Ce qui ne pèse pas à l'écoute : Snow borne sorrow est un album au sound design d'orfèvre, méticuleux et inspiré, une des plus belles réussites de 2005.

Wonderful world : le titre d'ouverture, puissant, cordes cinématiques et vocaux marelle de Stina Nordenstam, sur tom basse tendu et contrebasse de killer.
Atom and cell : réponse de Sylvian au 9/11, vocaux gospel - Didn't you promise us poetry ? - sur compte à rebours digital, quincaillerie de lamasserie et flûte perdue aux derniers étages.
Snow borne sorrow : la chanson titre, "Heartbeat" revisité - Let the children come to me -, blues sous toxine Trickyenne, avec reptation de trompette in a silent way.


LA MEILLEURE 2


Mais que fait-elle ?
Elle est en studio avec Portishead pour leur 3ème LP...

Portishead est même annoncé au festival Coachella (Californie) le 29 avril prochain.

LA MEILLEURE


C’est donc reparti pour un printemps avec elle ?
La dernière fois, elle était tombée à pic : après un automne d’effroi, bloqué quelque part hors saison, entre l’édifice magistral que Rustin Man avait bâti pour Beth Gibbons et la somptueuse imprudence de Bashung, Chan Marshall nous avait repris la main en douceur, confié à l’oreille You are free et procuré de furieuses envies d’aller au vert goûter sa nature.
L’automne dernier il y a bien eu quelques grands moments chez Richard Hawley, Antony and the Johnsons ou encore Keren Ann (Chelsea burns) mais aucun disque ne laissa une blessure aussi magnifique que Out of season ou L'imprudence.
The greatest ne servira donc pas de convalescence, il va juste nous rendre malade. Il suffit pour comprendre, d’une seule écoute de la valse en apesanteur qui porte à fleur d’ondes la voix étourdie de Chan Marshall sur « Where is my love ».
En comparaison à l’album précédent qui baignait voix et piano dans des réverbes spéléologiques, The greatest est plus sec, joue davantage l’espace en surface. Il sent le bois des Studios Ardent et on entend très vite la volonté de faire sonner le groupe avant toutes fantaisies atmosphériques. Option compréhensible avec de tels musiciens (le gratin de Memphis).
Malgré l'option du carburant soul, l’ajout de cuivres - il est vrai employés au cordeau -, The greatest paraît paradoxalement moins chaleureux et plus rude que son prédécesseur. C’est en écoutant de plus près la voix de Chan que j'ai eu cette impression. On la sent un peu moins habitée, plus retenue : bridée ? Seule au milieu de ces soul monuments de soixante ans, Chan aurait-elle pris un profil trop bas ? Encadrée par la rigueur de ces grands professionnels - quand bien même on imagine qu’ils ont dû être pleins d’attentions et de sollicitations à son endroit - peut-être n’a-t-elle pas eu l’occasion de s’aventurer hors structures ? Ou bien ce grain de désabusion n’est que le reflet d’un état qu’elle était incapable de travestir et qu’il faut déceler dans le texte terrible de Hate : Do you believe what she said / Do you believe what she said / I said I hate myself and I want to die ?
Quoi qu’il en soit, même sans la grâce particulière de I’m free, The Greatest est un superbe album de Cat Power et passage après passage, les chansons s’installent les unes après les autres dans mes intérieurs. Après une semaine d’inoculation, le quintet en désordre :


Lived in bars
: guitare taquinée au médiator, trompette bouchée et shoo bap, cette chanson qui pourrait servir de générique à Tendre est la nuit, donne une irrésistible envie de danser à deux après la fête ; Island qui nous emmène dans des contrées paresseuses façon Mazzy Star ; Where is my love est le bijou éternel de l’album. Cette façon de dire horses... galloping »… et enfin le poignant Hate.



Comme j’aimerais être à Memphis le 11 février prochain ! Il faut donc gagner le prochain euromillion avec quoi je pourrai affréter quelque Airbus et emmener tout le monde. Sinon il faudra bien patienter jusqu'au 8 mars prochain au Grand Rex.

Vous trouverez ici une vidéo athlétique de Living proof signée Harmony Korine où Chan, en combilatex rouge, court avec des musulmanes, une croix en bois blanc sur le dos...